ouragans et paleoclimatologie

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Ce dossier a été inspiré d'un article paru dans "pour la science" N°359 de septembre 2007 rédigé par Kam-biu Liu

Les ouragans font beaucoup parler d'eux à l'heure où la saison cyclonique dans l'atlantique bat son plein (de juin à novembre) et après que le cyclone Dean a frappé respectivement  La Martinique et la Guadeloupe (en catégorie 2) puis la Jamaïque (en catégorie 4) et enfin le Mexique (en catégorie 5). Voir à ce propos le dossier de présentation des ouragans. Comment savoir si les phénomènes actuels, relayés par les médias, sont plus importants en nombre et en ampleur que par le passé? C'est ce qu'a essayé de démêler Kam-biu Liu.

Habitant la Louisiane et donc directement concernée par ces phénomènes, et après Katrina, elle s'est posé la question de savoir si ces phénomènes étaient fréquents ou pas. Cette question a vivement intéressé le monde des assureurs qui l'a aidée à mener ses travaux.

Katrina, un ouragan dévastateur hors du commun?

Nous avons bien sûr tous en mémoire Katrina et ses ravages, surtout quand les vagues submergèrent la digue de La Nouvelle Orléans et firent plus de 1300 victimes. Ces digues avaient conçues pour résister à des ouragans de catégorie 3, ce qui fut le cas de Katrina quand il arriva sur la ville. Mais dans les 150 dernières années, aucun ouragan de catégorie 4 ou 5 n'a été signalé dans la région, on ne peut donc pas en vouloir aux ingénieurs des digues. Est-ce pour autant qu'un ouragan potentiellement plus destructeur que Katrina soit Impossible?

Elle pense alors à étudier les lacs côtiers, des étendues d'eau situées à quelques centaines de mètres des rivages qui ne sont atteints par les vagues de l'océan que par très forte houle déclenchée par des ouragans. A ce moment, la vague submerge la digue naturelle et arrive dans le lac côtier avec du sable. ce sable se dépose évidemment en plus grosse quantité du côté de la côte, par là où arrive la vague.

Carottages, controverses et résultats

Des carottages ont été effectués en Floride notamment. Elle a tout de suite trouvé trace de couches de sable bien nettes et bien tranchées avec des sédiments classiques au-dessus et en dessous, ce qui exclut des dépôts occasionnels mais fréquents par des tempêtes ou grandes marées. Ce sable n'a pas pu arriver par des rivières non plus car il serait alors arrivé de l'autre côté des lacs, pas du côté de la côte. La datation, au carbone 14 notamment a permis de remonter plusieurs milliers d'années en arrière. Certains géologues ont aussi émis l'hypothèse de changements de morphologie de la côte depuis 2 ou 3000 ans ce qui expliquerait les dépôts de sable. Mais l'examen de micro fossiles permettent d'assurer que ces lacs existent depuis plusieurs milliers d'années et que seuls des ouragans ont permis ces dépôts.

Je me permets d'apporter à ce moment là de l'article, une réserve sans doute bien naïve tant mes connaissances sont moindres mais qui m'est venue en tête la veille de l'écriture de ce dossier: Ces déversement de sable observés ne pourraient-ils avoir une origine de tsunami? Lors d'effondrements sous-marins ou de volcanisme intense, même loin à l'échelle de la planète, des surcôtes de l'océan sont observées et pourrait venir déposer du sable dans les lacs côtiers....

Quoi qu'il en soit, si ces observations sont le fait d'ouragans préhistoriques, alors on constate que 10 à 12  ouragans catastrophiques ont touchés la Louisiane depuis 3800 ans, soit environ une fois tous les 300 à 350 ans. Quand on parle d'ouragan catastrophique, on parle d'ouragan majeur de catégorie 5 dont les vagues ont été très nettement supérieures à celle de Katrina et ayant laissé des dépôts notoires et très importants dans les carottes (comparés à ceux de katrina).

Des variations au cours des temps et faisceaux concordant de preuves

Mais ce que révèlent ces études, c'est que l'activité fut sans doute faible le long du golfe du Mexique entre 5000 et 3800 ans avec un ouragan majeur tous les 1000 ans en moyenne et une activité plus importante de 3800 à 1000 ans avec un évènement tous les 200 ans en moyenne. Nous serions donc dans une période de calme relatif!

L'explication viendrait de la position de l'anticyclone des Açores. Il aurait été plus vers le sud-ouest entre 3800 et 1000 ans en arrière. La trajectoire des ouragans aurait été déviée vars le golfe du Mexique, augmentant le nombre d'ouragans dans cette zone. mais alors, le nombre d'ouragans aurait du baisser sur le nord-est des Etats-unis durant cette période. Des carottages à Cape cod ont étayé ce résultat et viennent conforté l'idée d'un décalage global de l'anticyclone des Açores. Des examens plus poussés viendront bientôt étayer les résultats.

D'autres preuves pourraient provenir des incendies "après-ouragans". En effet, l'année après un ouragan, de nombreux troncs et débris végétaux secs jonchent les forêts et donnent lieu à des incendies spectaculaires. C'est d'ailleurs ce qui a été observé en 1998. Mais le travail des hommes et du déblaiement rapide des déchets effacent aujourd'hui ces traces. Toutefois, un pic de charbon juste au-dessus de chaque couche de sable a été observée dans les carottes, ce qui laisse présumer que des incendies majeurs ont balayé la région juste après les ouragans.

Il reste à mener des études partout dans le monde. La Chine avec des archives remontant à près de 1000 ans permettrait d'établir un lien quasi certain entre les dépôts de sable et les ouragans. Cette discipline nouvelle nommée paléotempestologie pourrait avoir des répercussions importantes tans sur le point des connaissances scientifiques sur la fréquence et les impacts des ouragans majeurs que sur la façon de s'en protéger (ou de s'en garantir dans le cas des assureurs)